Mais pourquoi me suis-je engagé dans cette mission à la con moi déjà ? Nue-san m’a refilé un vieux truc à faire dont personne ne voulait et moi comme un gland j’ai accepté ! Non vraiment Takeo, il y a des jours où je ne te comprends plus ! Bah de toute manière, je n’ai plus tellement le choix maintenant, me défiler semble prohibé dans l’état actuel des choses. Si je retourne bredouille à la Soul Society, nul doute que la Commandante va encore une fois me faire chier et dieu sait que je n’aime pas quand elle s’énerve. Pour le moment, j’ai juste à me taire et à obéir aux ordres donc.

Et puis qui sait ce qui peut se cacher dans cette ville ! L’amateur de belles femmes que je suis aura, j’espère, l’occasion de se rincer copieusement l’œil. Je n’en demande pas beaucoup, non ? Enfin j’veux dire, c’est le strict minimum ! Parce que j’ai beau creuser, des côtés positifs à cette excursion il n’y en a pas beaucoup si j’exclus celui auquel je viens de penser. Alors s’il y a quelqu’un ou quelque chose au-dessus de nous, exauce mon souhait !

Heureusement, le trajet dans le Dangaï n’a pas été bien long. En même temps je commence un peu à m’habituer à le traverser mais bon, je pense qu’il aurait plus de succès si on ajoutait quelques décorations un peu flashy par-ci par-là. Il faut dire que cet endroit fout un peu les jetons même à un type de mon calibre.

Donc je parviens facilement à pénétrer dans Karakura. Ah…rien n’a changé. Cela fait peu de temps que je ne suis pas allé là-bas pourtant je ne peux m’empêcher de ressentir une certaine forme d’habitude quand mes pieds foulent le sol goudronné de cette ville. Equipé d’un Gigai fabriqué par la très aimable troisième division afin de masquer ma pression spirituelle, je me dirige sans tarder vers le fast food le plus proche de ma position. Mais il fait déjà nuit noire par conséquent je doute que l’un de ces restaurants ne soit encore ouvert à cette heure. D’ailleurs je m’aperçois qu’il fait un peu frais dans les environs et à mon grand désarroi je n’ai aucun endroit où loger. Eh bien on peut dire que tout va pour le mieux ! Et maintenant c’est mon estomac qui fait des siennes en hurlant à la mort pour que je lui donne quelque chose à se mettre sous la dent. Pas de nourriture, pas de toit…génial !

Pourtant mon attention est attirée par une toute autre chose. Un hollow est apparu en ville. Je me précipite donc pour aller l’intercepter avant qu’il ne cause pas trop de dégâts. Tant qu’à faire, autant aider la population ! Je me retrouve alors face à lui dans une ruelle sombre et franchement il n’est pas beau à voir. Mais qu’importe, son sort reste le même ! Néanmoins, avant même de pouvoir dégainer mon épée, je sens la présence d’une autre personne derrière moi. Putain, je ne peux pas faire sauter ma couverture alors que je viens à peine d’arriver ! Ca ne me ressemble pas mais dans cette situation, cette solution semble s’imposer d’elle-même !

« AU SECOURS AU SECOURS ! HELP ! IL VA ME TUER ! »

Je tombe au sol, fesses les premières puis je remue les bras de manière frénétique pour simuler un besoin urgent d’aide. Et maintenant, prions pour que la personne se trouvant derrière moi ne soit venue ici uniquement sur un coup du hasard et bien pour casser du Hollow…sinon j’suis foutu.

]Ma pseudo-sauveuse semble me fixer pendant de longues secondes comme si elle attend quelque chose de moi, une réaction peut-être ? Je ne peux pas être plus expressif que je ne le suis à l’instant. A gesticuler dans tous les sens pour attirer son regard sur mon besoin d’aide. Mais il faut également que je veille à ne pas en faire trop afin d’éviter qu’elle ne commence déjà à avoir des soupçons sur moi. Me faire repérer maintenant est absolument prohibé. Pour ne pas faire quelque chose qui pourrait dissiper ma couverture, je me recroqueville rapidement sur moi pour empêcher cette fille de pouvoir regarder mon visage. Quoique l’on dirait qu’en réalité, celle-ci n’en a strictement rien à foutre de moi.

Je ne peux pas m’empêcher de scruter minutieusement son visage et force est de constater qu’elle a pas mal d’atouts pour elle. J’irai même jusqu’à dire cette jeune fille est carrément belle gosse. Pourtant son visage, lui, est étrangement « passif ». Je n’arrive pas à lire de sentiments sur son visage, comme si cette personne ne ressent rien. Pourtant je sais pertinemment que ceci est impossible car tout humain, aussi diabolique soit-il, éprouve toujours des sentiments. Mais elle…bon à part l’exaspération due à ma prestation plus que minable et légèrement humiliante, je ne parviens pas à le sentir. Elle pourrait au moins avoir peur de cette bête plus qu’hideuse ! Non pas que je la considère uniquement comme une fille fragile mais ce genre d’abominations peut facilement abîmer la rétine lorsque l’on n’en pas l’habitude. Cependant plus je l’observe et plus je remarque quelque chose qui devient peu à peu de plus en plus évident. Cette femme est étrangement calme, trop calme même. Ca me plaît moyennement, finalement…

En quelques instants, cette nymphe à la chevelure d’argent fait apparaître presque de nulle part un instrument de musique, un violon pour être plus précis. J’aurai pu me demander en premier lieu en quoi un violon pourrait être utile face à un tel monstre mais le fait que celle-ci l’ait fait apparaître instantanément dissipe tous mes doutes à propos d’elle. Une Fullbringer se trouve derrière moi. Reste à observer minutieusement les pouvoirs qu’elle possède et aussitôt dit, aussitôt fait. Elle commence à jouer…des spasmes me secouent violemment et de manière brutale et surtout inattendue. Putain mais c’quoi ce bordel ? Mais celui qui souffre le plus à cet instant, c’est bien le Hollow qui finit par carrément exploser. Quel drôle de pouvoir qu’elle possède.

Je respire lentement tout en reprenant une position assise qui sera déjà plus honorant pour moi et à cet instant, nos regards se croisent. J’ai l’impression de la fixer pendant une éternité alors que ce moment ne dure en réalité que quelques instants. Mon rythme cardiaque s’intensifie alors qu’elle commence déjà à rebrousser chemin après avoir chuchoté quelque chose d’inaudible. J’ignore à qui elle s’adresse mais je ne peux pas en rester là !

Je me relève donc rapidement avant de m’élancer à sa poursuite. Heureusement pour moi, celle-ci n’a eu le temps de faire que quelques pas. Je la dépasse donc avec aisance afin de lui bloquer le chemin pour éviter qu’elle s’en aille !

« Hé, je n’ai même pas pu te remercier pour ce que tu as fait ! C’était vraiment sympa de ta part, j’te dois vraiment la vie ! »

De longues secondes passent mais pas de réponse. Habituellement lorsque l’on dit ce genre de choses à une personne lambda, celle-ci répond au moins. Mais là non, que dalle. Peut-être que je l’insupporte vraiment trop qui sait.

« Tu peux parler tu sais ! Je ne vais pas te manger, enfin du regard peut-être mais sinon, non, et puis ce super violon, WHAOU, wonderful ! Ha…ha…ha…»

Un vent…pour changer…

Je trouve que je joue la comédie de manière plutôt satisfaisante. La pauvre petite semble n’y voir que du feu. Je n’ai pas vraiment de remords à me jouer ainsi d’elle pour obtenir les informations dont j’ai besoin car cela fait bien longtemps que j’ai abandonné ma naïveté ainsi que le fait de croire qu’il existe du bon dans ce monde. Bien sûr je n’exclue la probabilité qu’un jour un miracle se produise et que je rencontre une personne qui puisse me faire changer radicalement d’avis. A moins que ce ne soit l’inverse…que ce soit moi et seulement moi qui doit prouver à cette individu que toute vie vaut la peine d’être vécue. Enfin je ne dois pas trop me poser de questions à propos de ça et profiter avant tout de l’instant présent. Et à cet instant je me demande sincèrement ce que je suis en train de foutre.

Me forcer à jouer ainsi le mec en chien et totalement à fond sur elle, je n’y suis clairement pas habitué malgré mon talent pourtant manifeste. Pourtant je ne peux m’empêcher d’être pris de court lorsqu’elle me révèle enfin ce qui lui est arrivée et par conséquent à quelle occasion celle-ci a obtenu ses pouvoirs. Un Hollow lui a sauvagement détruit ses cordes vocales, la privant donc à jamais de l’usage de la parole. Cette fille a carrément besoin d’un bloc note afin de pouvoir s’exprimer. Pour une fois je suis totalement pris au dépourvu, je ne sais pas du tout comment réagir. Dois-je pleurer ? Etre ému ? Ou rester indifférent ? Dans cette situation, que puis-je faire ?

Je suppose que cette personne s’est habituée à son handicap, vu l’indifférence qui l’entourait lorsqu’elle a écrit cette phrase sur ce petit bout de papier. Pourtant je ne peux pas m’empêcher de ressentir une certaine forme de malaise en rapport avec son inaptitude à parler de vive voix alors que je viens à peine de la rencontrer cette fille. Est-ce de la pitié de que je ressens à son égard alors que je fais face à un Fullbringer, l’un de nos potentiels ennemis ? J’imagine que son physique ne doit pas me laisser de marbre non plus sinon je dois avouer que je serais sans doute parti depuis bien longtemps. Mon regard se durcit sans que je le veuille vraiment comme si mon corps souhaite lui montrer que son état m’affecte plus ou moins.

Cette fille me fait même l’honneur d’écrire une nouvelle phrase. Celle-ci mentionne « les gens comme nous » mais à quoi fait-elle allusion exactement ? Est-elle en train d’évoquer les autres Fullbringers qui peuvent rôder dans le coin ? Celle-ci m’adresse alors un regard lourd de sens mais ce n’est pas ce genre de choses qui peut m’arrêter. Alors que celle-ci tourne brusquement les talons pour reprendre, je me suis senti obligé de lâcher un :

« Je n’ai pas de chez moi, sorry. »

J’ignore la réaction que j’ai envie de provoquer chez elle mais les faits sont là. Je n’ai aucun toit sous lequel m’abriter et je doute que cela puisse réellement l’émouvoir. D’ailleurs je ne connais toujours pas son nom. Je la retiens alors par le bras pour l’empêcher de s’en aller.

« Attends.»

Qu’est-ce que je peux bien lui dire pour éveiller sa curiosité ?

« On dit de rien lorsqu’on est poli ! »

Mais qu’est-ce qui m’a pris de sortir ça sérieusement ? Je dois me rattraper, en bien ou en mal ! Je la rapproche alors de moi jusqu’à ce que nos corps se collent, contre son gré j’imagine, puis j’entame une valse. Même si le décor et la situation ne s’y prêtent guère, je suis pris d’une irrésistible envie de danser.

« Let’s party ! »

Je dois avouer que ces quelques minutes de danse me paraissent complètement irréelles sachant ce qu’il s’est passé il y a de cela quelques instants à peine. J’ignore moi-même quelle est la raison concrète qui m’a poussé à faire ce geste et je doute que ma partenaire y comprenne quelque chose aussi. Pourtant sans se trop prier, cette fille s’est laissée emporter par mes pas de danse pourtant pas très fabuleux surtout dans l’état dans lequel je me trouve actuellement. Elle a accepté de valser avec moi ! Je n’en reviens toujours pas. Je me suis préparé mentalement à recevoir de nombreux coups plus violents les uns que les autres visant sans retenue les parties sensibles de l’anatomie humaine mais que nenni ! C’est un moment calme et doux qui se déroule juste après la destruction d’un hollow donc autant dire que le moment coincide parfaitement avec la situation, surtout dans un endroit peu éclairé, lugubre, sale et poussiéreux comme celui-ci.

La situation m’intrigue d’autant plus que je partage un instant plutôt intime je dirai avec une fille –je ne me vois pas faire ça avec un mec désolé- qui peut s’avérer être une ennemie potentielle le lendemain. Je viens de voir à l’œuvre des pouvoirs assez puissants et diablement dangereux puisque liés au son. Qui se méfierait d’une jolie jeune fille possédant un « simple » violon ? Bon je doute fort que les Hollows simples comme de vulgaires Menos s’attardent sur le physique plutôt avantageux, je ne peux le nier, de cette demoiselle, quid des Arrancars voire même des Shinigamis ? Mon insatiable curiosité me pousse à essayer d’en savoir plus sur elle jusqu’à carrément franchir la limite car je me doute bien que je suis en train de la faire franchement chier mais je persiste à creuser, à creuser, à chaque fois de manière plus profonde. Combien de temps va-t-elle encore tenir ? Quelques secondes, minutes ?

J’interromps brutalement cet instant de douceur car il semble que je percute enfin que le lieu dans lequel nous nous trouvons actuellement n’est vraiment pas fait pour. Je ne parviens pas à saisir l’expression qui a traversé son visage à l’instant où nos corps se sont séparés. De la joie ? De la tristesse ? Peut-être même du dégoût qui sait. Mais peu importe, qu’elle m’aime ou qu’elle me déteste ne me concerne pas. Je suis ici parce que Nue m’a demandé d’enquêter sur les phénomènes étranges qui surviennent à Karakura dont les Fullbringers font parti. Ni plus ni moins. Je n’ai pas à m’emcombrer la tête avec tous ces détails complètement futiles que j’oublierai très certainement lorsque je serai revenu à la Soul Society. Mais j’ai l’impression de me dire ça uniquement pour tenter de m’autopersuader que cette nana ne vaut pas le coup. Dès que mon regard croise le sien, je suis comme envoûté par lui. Suis-je véritablement en train de jouer la comédie pour en apprendre davantage sur elle ? Ou c’est uniquement moi qui souhaite prolonger cette conversation pour moi et non pas pour cette putain de Soul Society ?

« Je dois t’avouer que ce n’est pas très commun de danser dans une ruelle, surtout à cette heure-ci but j’espère que t’as apprécié le geste. D’ailleurs…je ne sais toujours pas comment tu t’appelles.»

Je ne sais pas pourquoi je lui demande de cette manière-là mais au moins c’est dit ! Si je peux la retrouver dans le futur, ça sera déjà ça de gagné.

« Ah oui, euh il vaut mieux que le mec se présente en premier no ? Enfin il parait que c’est comme ça alors je vais me tenir aux traditions. Moi c’est Takeo, enchanté ! » dis-je en lui serrant la main de manière délicate pour ne pas trop la brusquer tout en rougissant légèrement. « Bon, il serait temps que je vous laisse tranquille non ? »